Module « Informatique et Société numérique» au lycée

Proposition du CREIS (Centre de coordination pour la Recherche et l'Enseignement en Informatique et Société)

 

 

               Dans pratiquement toutes ses activités, l'être humain est amené à utiliser, à traiter de l'information. Ainsi, depuis qu'il existe, l'Homme fait du traitement “ naturel ” de l'information. Avec l'informatique, il s'est donné un artefact qui lui permet de faire du traitement automatique, “ artificiel ”, de l'information. Aujourd'hui, la plupart des systèmes informatiques sont des systèmes interactifs “ homme-machine ” qui intègrent et combinent ces deux types de traitements. Ceci peut s'accompagner d'un développement de systèmes entièrement automatisés. Ces systèmes informatiques permettent de traiter l'information sous toutes ses formes (textes, images, sons,…), d'accéder, de façon interactive, à une information de plus en plus diversifiée, et de communiquer selon divers modes, avec différents interlocuteurs. Les ordinateurs et l'informatique sont aujourd'hui omniprésents dans pratiquement toutes les sphères de la société.

               L'informatique et l'ordinateur ne constituent donc pas seulement une réalité scientifique et technique, mais un phénomène sociétal de grande ampleur, aux implications multiples, souvent ambivalentes, et aux conséquences souvent mal maîtrisées.

               La société, avec ses différentes sphères (économique, sociale, politique, culturelle, juridique, scientifique, technique), constitue un système d'une très grande complexité. L'étude des interactions entre l'informatique et la société nécessite donc une approche systémique, une démarche raisonnée, critique, permettant de comprendre la réalité dans toute sa complexité, de discerner les aspects positifs et négatifs d'une  application, d'une réalisation, d'une situation.

Ainsi, un  enseignement de type « Informatique et société » ne peut que contribuer à la réalisation de l'objectif essentiel de l'école : former des citoyens, personnes cultivées, capables de comprendre le monde dans lequel ils vivent, d'avoir prise sur la réalité et de la transformer par une utilisation rationnelle, critique et intelligente des sciences et des techniques.


 

 

PROPOSITION DE PROGRAMME « INFORMATIQUE ET SOCIÉTÉ » POUR L'OPTION INFORMATIQUE DU LYCEE

(sur une base d'une dizaine d'heures chaque année)

 

Classe de seconde

 

I- UN PANORAMA DU DEVELOPPEMENT DE L'INFORMATIQUE

 

               1°) De la naissance des ordinateurs à Internet : les avancées scientifiques et techniques, la diversité des applications et les grands domaines concernés par l'informatisation.

La conception et la réalisation des ordinateurs, le développement de l'informatique, sont le résultat de tout un ensemble de travaux scientifiques et techniques (recherches théoriques et appliquées), menés pendant plusieurs siècles. A chaque étape de ce processus, il a fallu que soient réunies des conditions économiques, sociales, politiques et culturelles pour que soient élaborés les concepts fondamentaux de l'informatique et que soient conçues les machines (calculateurs puis ordinateurs).

A partir des années 1950, avec la commercialisation des premiers ordinateurs, l'informatique va se diffuser dans pratiquement tous les secteurs d'activité de la société.

Les avancées scientifiques et techniques de ces quinze dernières années ont donné naissance à des architectures de systèmes informatiques répartis, capables de traiter l'information multimédia, en généralisant l'interactivité homme-machine à l'échelle de la planète. Les recherches scientifiques et techniques ont conduit aussi à la réalisation de logiciels traitant des modèles de plus en plus complexes.

 

             2°) La science informatique et les modèles

 

La science informatique conduit à la création de modèles, souvent  en liaison avec d'autres sciences (physique, biologie, économie,…).

Pour pouvoir être traitée automatiquement, l'information, par un processus de représentation, doit être formalisée, modélisée sous forme d'un ensemble structuré. A ce concept fondamental de “formalisation-modélisation de l'information” se rattachent, entre autres, tous les problèmes de calculabilité. L'être humain, quelle que soit son activité, est donc de plus en plus souvent conduit à appréhender le réel par l'intermédiaire de modèles formalisés. Se pose alors la question de l'adéquation du modèle à la réalité qu'il est censé représenter. En effet, ces modèles, quel que soit leur degré de sophistication, sont toujours réducteurs dans la mesure où la réalisation d'un modèle conduit à simplifier la réalité. On doit donc, en toute circonstance, avoir présent à l'esprit les limites du modèle que l'on réalise, ou que l'on utilise, et bien définir son domaine de validité.

 

               3°) Que nous réserve l'avenir ?

 

A moyen terme, on peut prévoir un perfectionnement des techniques actuelles.

A plus long terme, on peut envisager des applications utilisant les nanotechnologies, la réalisation de nouvelles machines ainsi que de nouvelles générations de robots et la constitution d'un continuum entre l'Homme et son environnement technique (homme bionique),…

 

 

II- L'INFORMATION ET LA COMMUNICATION INFORMATISEES

 

1°) Les caractéristiques de l'information numérisée et informatisée.

 

Les systèmes informatiques de traitement et de mémorisation de l'information (fichiers, bases de données, sites Internet, blogs) permettent d'offrir au public :

§         une masse d'informations qui croît de façon exponentielle ;

§         une information mise à jour régulièrement ;

§         un accès quasi instantané à l'information;

§         des outils de recherche et de sélection automatiques (moteurs de recherche) ;

§         des possibilités de recherche évolutive, grâce à l'interactivité.

 

               2°) Les caractéristiques de la communication informatisée.

 

Les réseaux informatiques interconnectés à l'échelle mondiale modifient profondément notre rapport à l'espace et au temps en créant une illusion d'ubiquité.

Cependant, les réseaux de type Internet offrent des possibilités nouvelles par rapport aux moyens de communication antérieurs. En simplifiant, nous pouvons dire que ceux-ci se présentaient essentiellement sous deux formes :

§         communication de "un" vers "un" de façon interactive (téléphone par exemple);

§         communication de "un" vers "tous" de façon non-interactive, unidirectionnelle (radio, télévision par exemple).

Les réseaux de type Internet permettent, potentiellement, une communication de "tous" vers "tous" de façon interactive. En effet, avec de tels réseaux, chacun peut être tour à tour "émetteur" et "récepteur" et ce, à l'échelle planétaire (réseaux sociaux, messageries électroniques, applications de type WIKI).

 

               3°) Quelques problèmes et enjeux.

 

Pas plus qu'un tas de pierres n'est une maison, un ensemble d'informations ne constitue pas un savoir, une connaissance. Acquérir des savoirs, des connaissances implique une activité mentale structurante.

La navigation hypertextuelle, dans une encyclopédie par exemple, peut conduire à l'acquisition d'un "savoir fragmenté". La recherche hypertextuelle constitue sans doute un excellent moyen d'approfondissement des savoirs d'élargissement des connaissances ; ce n'est pas forcément la meilleure façon d'acquérir des savoirs de base, de structurer des informations pour en faire des connaissances.

Il existe aussi des risques de sur-information, des problèmes de recherche de l'information pertinente dans cette masse considérable d'informations disponibles. Les capacités d'assimilation de l'être humain étant limitées, une situation de sur-information équivaut à une situation de non-information, voire de désinformation.

Se pose également le problème de la qualité et de la fiabilité de l'information à laquelle on a accès ; d'où la nécessité pour chacun de se créer un système de références et de développer un esprit critique. En outre, certaines informations peuvent présenter un caractère délictueux ; ce qui pose la question de la cybercriminalité.

Concernant l'information, il faut avoir conscience que les mises à jour successives peuvent engendrer une transformation du contenu informationnel avec, souvent, une perte de l'information-source ainsi que des différentes étapes de son évolution.

Notons enfin les risques d'exclusion, de ségrégation dans l'accès à ce type d'information de différentes catégories de la population dans les pays développés (raisons économiques ou socio-culturelles) et de peuples entiers dans les autres pays (absence quasi-totale de structures techniques). Une autre forme d'exclusion concerne les catégories de personnes qui s'enferment dans le monde virtuel, en marge de toute vie

sociale.

 

III- LA CREATION ARTISTIQUE ASSISTEE PAR ORDINATEUR

 

Au cours des trois dernières décennies, une production artistique assistée par ordinateur, s'est progressivement développée. La numérisation des sons, des images, des textes offre des potentialités nouvelles à la création artistique qui repose, en général, sur l'utilisation de la combinatoire, du hasard, et de différentes opérations portant sur des éléments formalisés.

Quelle est alors la part de l'ordinateur dans la création de l'œuvre intellectuelle ?

Avant d'essayer de répondre à cette question, nous allons examiner la production d'œuvres dans deux domaines artistiques.

 

1°) Informatique et musique.

 

Les techniques informatiques ont pénétré très tôt le domaine de la musique. La mise au point du synthétiseur a permis d'offrir au musicien une palette de sons bien plus étendue que celle qu'il connaissait auparavant. Les logiciels et les synthétiseurs permettent d'enregistrer, de composer et de modifier à volonté une variété quasi infinie de sons. Citons les créations de musique électronique de trois compositeurs bien connus : Jean-Michel Jarre, Vangelis, Ennio Morricone ainsi que le développement de la musique techno.

La composition automatique permet, à partir d'un logiciel que l'on va paramétrer, et d'opérations de tirage au sort à différentes étapes du déroulement du programme, de générer différentes partitions. En général, les partitions ainsi produites sont revues par le compositeur qui effectue un choix. Dans ce domaine, les travaux menés par l'IRCAM (Institut de Recherche et de Coordination Acoustique/Musique) présentent un grand intérêt.

 

2°) Informatique et image.

 

L'ordinateur a permis de créer un nouveau système de réalisation d'œuvres plastiques en partant de l'image numérisée. L'image est mémorisée dans l'ordinateur sous forme d'un ensemble de points (pixels) auquel on pourra appliquer différents traitements (modification de formes, de couleurs,…). Cette image numérisée peut être obtenue en partant d'une image réelle, une photographie par exemple, ou en la créant à l'aide d'un logiciel générateur d'images de synthèse. Quelques exemples : photos-tableaux d'Andréas Gursky, films et vidéos en images de synthèse, images fractales, conception d'oeuvres architecturales (Musée Guggenheim de Bilbao, Abbaye de Cluny virtuelle).

 

3°) L'ordinateur créateur d'œuvres artistiques ?

 

La création artistique fait appel à l'intelligence et à la sensibilité de l'être humain, à ses expériences et à son vécu. Il est évidemment impossible à un ordinateur de vivre l'expérience humaine dans toutes ses dimensions, intellectuelles et affectives.

Dans la création assistée par ordinateur, les logiciels permettent de générer des œuvres (musicales, plastiques) à partir des données et des paramètres qui lui ont été fournis par l'artiste. Cette génération de musique ou d'images fait souvent appel à la combinatoire et au hasard, ce qui peut donner l'impression que l'ordinateur crée, de façon autonome, de nouvelles formes. Mais, c'est l'artiste qui fera un choix parmi toutes les œuvres proposées par le logiciel. Ainsi, en amont et en aval du traitement informatique, il y a l'intervention de l'Homme, de l'artiste ; c'est là que se situent les actes créateurs.


 

 

Classe de première

 

I- LES FICHIERS ET LES TRAITEMENTS DE DONNEES  A CARACTERE PERSONNEL 

 

               1°) Pourquoi recueille-t-on et traite-t-on des données personnelles ?

Les fichiers informatisés comportant des informations sur les personnes ont commencé à se développer il y a une cinquantaine d'années. Depuis les traitements informatiques de données à caractère personnel n'ont cessé de se multiplier et de se diversifier.

Les raisons mises en avant pour justifier la création de ces applications sont diverses et variées : impératifs de gestion, diminution des coûts et augmentation de la productivité, amélioration et diversification des services (au client, à l'administré, à l'internaute), lutte contre les différentes formes de délinquance afin d'assurer la sécurité des biens, des personnes, de l'Etat, de la Défense,…

 

        2°) Quels sont les risques d'atteinte à la vie privée et aux libertés ?

 

Les possibilités de fichage et de contrôle qu'offre l'informatique sont sans commune mesure avec celles que présentaient les procédés antérieurs :

§         augmentation des capacités de stockage et des vitesses de traitement ;

§         possibilités d'effectuer une grande variété de traitements : tris, fusions, interconnexions, mises à jour, recopies, sélection,... ;

§         facilité d'utilisation de la méthode des profils (“client solvable”, "candidat à l'embauche",...).

Toutes ces possibilités tendent à développer les tendances à l'accumulation d'informations (sans tenir compte de la finalité prévue lors de la collecte), et à leur conservation, au-delà du temps nécessaire à la mise en œuvre de l'application.

Ainsi il est possible de suivre et de contrôler un individu dans une grande partie de ses faits et gestes quotidiens et ce, tout au long de sa vie.

Sur les réseaux informatiques, en  particulier sur Internet, les moteurs de recherche permettent de réaliser, de façon quasi instantanée, l'interconnexion à distance de fichiers et de données à caractère personnel. De même, de nouvelles applications, tels les réseaux sociaux, permettent les échanges d'informations personnelles dont la confidentialité n'est pas toujours garantie.

L'utilisation quotidienne d'objets techniques tels que les téléphones portables, les cartes bancaires, les systèmes RFID génère l'enregistrement de données sur les pratiques et les comportements de la quasi totalité de la population. Ce type d'informations, ces « traces » sont aussi recueillies par les systèmes de vidéosurveillance ou de cybersurveillance (du citoyen ou du salarié), ainsi que par les dispositifs de géolocalisation des personnes et des marchandises.

Notons enfin que les avancées techniques dans de nombreux domaines : biométrie, puces RFID, nanotechnologies, donnent lieu à de nouvelles applications informatiques qui risquent, elles aussi, de porter atteinte à la vie privée et aux libertés des personnes.

 

                                                            3°) Comment se protéger contre ces risques ?

 

Cette protection comporte une double dimension : juridique et personnelle. Ceci implique :

§         Une connaissance des principales dispositions de la loi « Informatique et libertés » et de ses limites ;

§         Une application de cette loi excluant tout laxisme ;

§         Une prise de conscience individuelle et collective de ces risques et de la nécessité d'être vigilant quand on donne des informations personnelles, en particulier sur Internet.

 

II- LA PROTECTION DES CREATIONS INTELLECTUELLES

 

               1°) La protection des oeuvres de l'esprit par le droit d'auteur ou par les droits voisins du droit d'auteur.

§         Qu'est-ce qu'une œuvre de l'esprit ?

§         Le droit moral et le droit patrimonial.

§         Le droit de copie pour usage privé.

               2°) La protection des logiciels par le droit d'auteur (avec quelques dispositions dérogatoires).

En particulier, pas de droit de copie pour usage privé.

               3°) Les logiciels libres et les licences « Creative commons ».

 Bien expliciter les conditions d'usage et l'intérêt de ces produits ou services.

               4°) La réglementation du téléchargement des œuvres protégées.

Analyser les enjeux culturels et économiques qui permettent d'en comprendre les dispositions.

 

 

 

 

 

Classe de Terminale

 

 

I- LE ROLE DETERMINANT DE L'INFORMATIQUE DANS LE PROCESSUS DE MONDIALISATION

 

         1°) Réseaux informatiques de transactions bancaires et boursières, logiciels de conception et de gestion de produits financiers de plus en plus sophistiqués.

§         Les réseaux informatiques (par ex. Swift) ont contribué de façon décisive à la mondialisation du secteur financier.

§         Tout un ensemble de produits financiers, conçus à partir de modèles mathématiques informatisés, sont gérés grâce à des logiciels spécifiques.

§         Croissance incontrôlée et opacité des transactions et des produits du secteur financier.

 

         2°) Commerce électronique : différentes formes d'échange de produits et de services.

§         Pour les entreprises traditionnelles.

§         Pour les entreprises de l'Internet.

§         Importance du commerce électronique, secteur en expansion.

§         Restructuration de l'économie mondiale et problèmes de fiabilité et de sécurité des transactions.

 

II- L'INFORMATIQUE ET LES CONDITIONS DE TRAVAIL : UNE REALITE AMBIVALENTE

 

L'informatisation de l'activité de travail est un processus ambivalent qui peut se traduire par :

 

         1°) Une amélioration des conditions de travail, aussi bien dans le secteur industriel que dans celui du travail de bureau ou des services.

§         Diminution de la pénibilité physique et des risques d'accident du travail.

§         Suppression de tâches répétitives, fastidieuses, déqualifiées.

 

         2°) La pérennisation de mauvaises conditions de travail ou l'apparition de problèmes spécifiques induits par le travail sur système informatique.

§         Développement de formes d'organisation du travail de type taylorien et fordien, en particulier dans le secteur tertiaire.

§         Fatigue nerveuse, stress, pénibilité psychologique du travail sur système informatique.

§         Fatigue visuelle et troubles musculo-squelettiques (TMS).

§         Cybersurveillance du salarié et contrôle de son activité au travail.

L'amélioration des conditions de travail nécessite alors la mise en œuvre de mesures d'ordre organisationnel et d'ordre ergonomique.

 

Le 01/06/2009