Lettre commune appelant à voter contre le règlement de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne

Mesdames les députées, Messieurs les députés,

Le 28 avril prochain, le Parlement européen est appelé à voter en deuxième lecture sur la proposition du règlement de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne.

Ce texte, tel qu’il est rédigé aujourd’hui, permettrait aux autorités de n’importe quel État membre de l’Union européenne de demander à toute plateforme en ligne le retrait en une heure d’un contenu que cette autorité aurait considéré comme relevant d’un caractère terroriste.

Nous, organisations, syndicats et associations de défense des libertés, vous demandons de voter contre cette proposition.

En l’état, ce texte risque d’affaiblir nos droits et libertés fondamentales :

  • En donnant la possibilité à une autorité d’imposer aux services en ligne, sous la menace d’importantes sanctions, le retrait d’un contenu en seulement une heure, cette proposition risque de renforcer le développement d’outils de filtrage automatisé et de nuire ainsi gravement à la liberté d’expression en ligne ;
  • L’absence de tout contrôle judiciaire indépendant et le caractère possiblement transfrontalier des demandes de retrait pourraient mener à la censure d’opposants politiques et de mouvements sociaux.

Les dangers de ce texte ont été régulièrement dénoncés par de nombreuses organisations et institutions depuis sa présentation [1]. Récemment encore, 61 organisations européennes ont rappelé le risque qu’il posait et vous ont demandé, en tant que parlementaires, de le rejeter [2].

Nous rejoignons leur appel et attirons tout particulièrement votre attention sur les contradictions de ce texte avec la décision du Conseil constitutionnel français du 18 juin 2020 sur la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur Internet telle que proposée par la députée Laetitia Avia [3]. Le juge constitutionnel y a notamment censuré une disposition semblable à celle prévue dans la proposition de règlement permettant à l’autorité administrative de demander à toute plateforme en ligne le retrait en une heure d’un contenu que cette autorité aurait qualifié de terroriste, sans le contrôle préalable d’un juge.

Le Conseil constitutionnel a notamment justifié sa censure du fait que l’appréciation du caractère illicite du contenu était soumise à la seule appréciation de l’administration, que le recours contre la

demande de retrait n’était pas suspensif et que le délai d’une heure ne permettait pas d’obtenir une décision d’un juge avant le retrait du contenu. Il en a déduit que cette disposition constituait une atteinte à la liberté d’expression et de communication qui n’était pas adaptée, proportionnée ou nécessaire.

Aucune des dispositions prévues aujourd’hui dans la proposition de règlement européen ne vient rectifier la contradiction flagrante entre les exigences constitutionnelles françaises et l’obligation de censure en une heure au cœur du texte sur lequel vous êtes appelé(e)s à voter.

Nous vous demandons donc de respecter la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2020 et de rejeter ce texte contraire à nos droits et libertés fondamentales.

Organisations signataires de la lettre commune :

CREIS-Terminal

CECIL

Globenet

Internet Sans Frontières

Internet Society France

La Quadrature du Net

Ligue des droits de l’Homme

Observatoire des Libertés et du Numérique

Renaissance Numérique

Syndicat de la Magistrature

Syndicat des Avocats de France

Wikimedia France

[1] En décembre 2018, plus de 60 organisations demandaient déjà le retrait de texte.

Plus récemment, le 3 novembre 2020, les rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont ainsi alerté des dangers de ce texte pour les libertés fondamentales.

[2] Le 27 mars 2021, une coalition de 61 organisations européennes a demandé aux parlementaires européens de rejeter ce texte.

[3] Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-801 DC du 18 juin 202

26 mars 2021 : Journée d’étude sur la blockchain

 

Journée d’étude CREIS-Terminal

avec le CERSA-CNRS

et le laboratoire LITEM  (Université Évry Val-d’Essonne,  Institut Mines-Télécom Business School, et École Doctorale « Droit, Economie, Management » de l’Université Paris-Saclay)


La blockchain :

enjeux juridiques, économiques, de sécurité

et de coûts énergétiques

26 mars 2021 en ligne

Texte de présentation et programme ici

Le numéro 1 des réseaux sociaux numériques, Facebook, qui comprend WhatsApp, Instagram et Messenger, possède une mine considérable d’informations personnelles. Il a élaboré le projet de cryptomonnaie Libra, basé en Suisse et reposant sur la blockchain. Ce projet fédérant des entreprises et des organisations dans le domaine du paiement et de la transaction s’est mué en Diem mais reste d’actualité. De plus, à l’heure des interrogations relatives à la blockchain sur les droits d’auteur, la propriété intellectuelle et plus généralement les tiers de confiance, il semble important de rejoindre la multitude de réflexions en cours sur cette technologie qui est décentralisée avec un principe dit d’égal à égal. C’était aussi le cas au début d’Internet même si a suivi une « recentralisation » par les plateformes oligopolistiques, au premier rang desquelles les GAFA.

Elaborée voici une dizaine d’années seulement avec le bitcoin, la blockchain est de nature à rebattre les cartes des modèles économiques de bon nombre de secteurs qui risquent de connaître des bouleversements. La désintermédiation, provoquant un changement profond du rôle des intermédiaires, ouvre des perspectives mais présente aussi de vives menaces pour les tiers de confiance, comme la sécurité juridique ou la disparition d’acteurs. Dans le même temps, la blockchain provoque des doutes concernant les droits et le rapport aux données. Les traces, considérées comme preuves, dans le cadre des « preuves de travail »  (« épreuves cryptographiques dénommées minage ») afin d’éviter les abus, sur la blockchain font partie intégrante du principe qui structure ce réseau de données. Des banques aux organismes certifiant des documents, un nombre grandissant d’acteurs s’emparent de la question d’investir la blockchain. Le conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a d’ailleurs engagé une mission, le gouvernement une task force. Les acteurs s’intéressant ou investissant déjà la blockchain sont légion, aussi une orientation vers les « preuves d’enjeu », pour preuve de participation afin de viser le consensus, devrait être privilégiée pour soutenir sa croissance. Mais cette technologie présente un sérieux défi écologique. 

Nous souhaitons prendre du recul, en particulier pour Creis-Terminal pour saisir les risques voire les menaces relatives à la blockchain concernant la protection des données personnelles, thème relevant du champ Informatique et Société, sans nier ses atouts, en termes de création, de preuves, de collaboration.

Nous aborderons cinq axes de réflexion : sécurité, droit, intermédiation et données personnelles, développement et Fintech, énergie.

9h30 Ouverture de la journée d’étude CREIS-Terminal par Geneviève Vidal et David Fayon

avec pour le CERSA : Yves Surel, professeur de science politique à Paris 2, directeur du CERSA (UMR 7106 CNRS/Paris 2)

et pour le LITEM : Cédric Gossart, professeur, directeur adjoint du Litem (EA 7363, Université Paris-Saclay) et Samya Dhaiouir, doctorante à l’IMT

9h45 Introduction

Chantal Enguehard et David Fayon, Creis-Terminal 

Primavera De Filippi, CERSA-CNRS

10h Sécurité – discutant David Fayon

Renaud Lifchitz, Directeur Scientifique chez Holiseum, expert en cybersécurité blockchain

        Blockchain et cybersécurité

10h45 Droit – discutant Primavera De Filippi

Matthieu Quiniou, docteur en droit, chercheur en SIC à la Chaire UNESCO ITEN (UP8/FMSH), membre associé du Laboratoire Paragraphe (UP8) et avocat à la Cour d’Appel

        Enjeux juridiques de la blockchain

11h30 pause café

11h50 Intermédiation et données personnelles – discutant Michel Agnola

Klara Sok, senior manager au Blockchain Lab de PwC, Doctorante au Cnam, laboratoires Dicen-IdF et Lirsa

        Intermédiation, désintermédiation, réintermédiation

12h10 Lucas Léger, chef économiste chez Jax.Network, doctorant au CNAM sur les aspects microéconomiques des protocoles distribués types blockchains. spécialiste des enjeux économiques des données personnelles

        Les technologies distribuées et les données personnelles

12h30-14h pause déjeuner

14h Développement & Fintech – discutant : David Fayon

Jeremi Lepetit, co-fondateur Retreeb, start-up pour la blockchain

        Pour une technologie non consommatrice d’énergie à haute dose

14h45 Alexandre Leforestier, CEO Panodyssey

        Construire un nouveau modèle numérique européen en plaçant les créateurs au coeur de la création de valeur. Les Industries Culturelles et Créatives, un pilier de la relance post-crise.

15h30 Energie – discutant Dominique Carré

Dimitri Saingre, doctorant à IMT Atlantique, école du réseau Mines Télécom, au sein de l’équipe STACK

        L’impact environnemental des technologies blockchain

16h15 Débat

17h fin de la journée d’étude

Pour un avenir sans surveillance biométrique de masse – signez la pétition européenne

Pour un avenir sans surveillance biométrique de masse

Communiqué de lancement de la campagne « Reclaim Your Face », le 17 février 2021


Le collectif « Reclaim your Face », lance aujourd’hui sa campagne contre la surveillance biométrique et notamment la reconnaissance faciale. Reclaim Your Face est composé de plusieurs associations de défense des libertés et menée par l’organisation européenne  EDRi. Cette campagne prend la forme d’une «initiative citoyenne européenne» : il s’agit d’une pétition institutionnelle visant à recueillir 1 million de signatures au sein de plusieurs pays de l’Union européenne pour demander à la Commission d’interdire les pratiques de surveillance biométrique de masse.


En décembre 2019, l’OLN, accompagnée de 124 organisations, demandait déjà  l’interdiction de la reconnaissance faciale sécuritaire. Nous avions souligné les dangers de cette technologie : le risque d’une surveillance permanente et invisible de l’espace public, nous transformant en une société de suspect·es et réduisant nos corps à une fonction de traceurs constants pour abolir l’anonymat dans l’espace public
La surveillance biométrique ne se limite pas à la reconnaissance faciale. Un an après, notre demande d’interdiction n’a pas abouti et les techniques de surveillance biométrique se sont multipliées, notamment dans le contexte de la crise sanitaire. Alors que la police continue d’utiliser de façon massive la reconnaissance faciale à travers le fichier Traitement des Antécédents Judiciaires (TAJ), plusieurs villes et administrations ont déployé des dispositifs de contrôle de température, de détection de port du masque ou des projets de vidéosurveillance intelligente pour suivre et tracer les mouvements sociaux.
La France n’est malheureusement pas le seul pays où se développe cette surveillance biométrique. En Italie, en Serbie, en Grèce ou aux Pays-Bas, l’État déploie plusieurs dispositifs qui promettent à l’Europe un avenir de surveillance automatisée permanente. Des batailles contre la société de contrôle se jouent donc aujourd’hui : dans les mobilisations sociales contre les projets de loi sécuritaires, dans la lutte contre l’opacité qui entoure le déploiement de ces techniques, dans les tribunaux où sont contestées ces expérimentations de surveillance. 
Chaque initiative compte. Cette pétition européenne a pour objectif de montrer le refus populaire massif et d’imposer un débat sur l’arrêt du déploiement de ces outils de contrôle, et nous l’espérons permettra d’obtenir un texte protecteur à l’échelle de l’Union européenne.
C’est un combat important contre des futurs où nos corps et nos comportement seraient en permanence scannées.
Demandons donc ensemble l’interdiction formelle de la surveillance biométrique : de la reconnaissance faciale sécuritaire, de l’analyse des émotions et des comportements par la vidéosurveillance, des prédictions automatisées en raison de caractéristiques physiques, de l’analyse automatisée biométrique de nos profils sur les réseaux sociaux, de l’analyse automatique de nos voix et de nos comportements pour nous contrôler. 
Pour rejoindre cette lutte, nous vous invitons donc à signer et à relayer cette pétition sur la page de campagne de la Coalition Reclaim Your Face.


Organisations signataires relais de la campagne en France

Organisations membres de l’OLN :      La Quadrature du NetLa Ligue des Droits de l’Homme Le Syndicat de la Magistrature , Le Syndicat des Avocats de France (SAF),  Le CECILCreis-TerminalGlobenet

Ainsi que : Le Mouton Numérique,  Lève les yeux,  Attac.

Pour aller plus loin : Le texte de l’initiative validé par la Commission européenne et ses annexes disponibles ici en français


Voici le communiqué de lancement d’EDRi traduit en français.

« Initiative de la société civile en vue d’une interdiction des pratiques de surveillance biométrique de masse Nous exhortons la Commission européenne à réglementer strictement l’utilisation des technologies biométriques afin d’éviter toute atteinte injustifiée aux droits fondamentaux. Nous demandons en particulier à la Commission d’interdire, en droit et en pratique, les utilisations indifférenciées ou arbitrairement ciblées de la biométrie pouvant conduire à une surveillance de masse illégale. Ces systèmes intrusifs ne peuvent être développés, mis en place (même à titre expérimental) ou utilisés par des entités publiques ou privées dans la mesure où ils sont susceptibles d’entraîner une atteinte inutile ou disproportionnée aux droits fondamentaux des personnes.
Il apparaît que certaines utilisations de la surveillance biométrique de masse dans les États membres et par des agences de l’UE ont donné lieu à des violations de la législation de l’UE en matière de protection des données et ont indûment restreint les droits des personnes, y compris le droit au respect de la vie privée, le droit à la liberté d’expression, le droit de manifester et le droit à la non-discrimination. Le recours généralisé à la surveillance biométrique, au profilage et à la prédiction constitue une menace pour l’état de droit et pour nos libertés les plus fondamentales.
Par cette ICE, nous prions donc instamment la Commission de proposer un acte juridique qui s’appuiera sur les interdictions générales prévues par le RGPD et la directive en matière de protection des données dans le domaine répressif et respectera pleinement lesdites interdictions, pour faire en sorte que le droit de l’Union interdise explicitement et spécifiquement la surveillance biométrique de masse.

« La société numérique » numéro 128 de la revue Terminal en ligne

Il est en libre accès sur la plateforme Revues.org.


Le sommaire et les articles sont en ligne à l’URL :

https://journals.openedition.org/terminal/6286

En mai 2019 à Rennes, la Marsouin Digital Society Conference a hébergé plus de cinquante communications, issues d’équipes de recherche bretonnes, françaises et étrangères. Ce fut la dernière conférence de la vie d’avant : Covid-19 oblige, l’événement n’a pas eu lieu en mai 2020.

Terminal propose une sélection de trois articles et une expertise professionnelle, tous issus des communications de 2019. Il est déjà question d’existences qui évoluent via le numérique. En particulier dans le travail où une équipe de recherche a observé le déploiement et le fonctionnement d’une organisation du travail dite « agile ».
En complément, l’Hadopi était cette fois invitée à présenter ses propres travaux lors de la conférence Marsouin 2019. Il s’agit d’une proposition de panorama des pratiques culturelles en ligne des jeunes âgés de 18 à 24 ans.